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La guerre préventive en Europe

La fracture des nations

par Henri

Robert Cooper est le nouvel idéologue de la politique de défense et de sécurité européenne. De quoi inquiéter ! Car c’est lui qui, étant conseiller de Tony Blair pour les affaires étrangères, a développé le concept d’impérialisme défensif. Face aux menaces sur le monde dans les Etats en déliquescence ou aux ambitions démesurées, il faut intervenir, rétablir l’ordre, éliminer les « terroristes ». Cette tâche ne peut être exercée par les Etats-Unis seuls, car ils n’en ont pas les moyens. Il faut qu’en conséquence l’Europe bâtisse ses capacités militaires, à la fois pour l’aider et pour affirmer les positions propres de l’Union.

Ce sont en gros les thèses élaborées dans le nouveau livre de Robert Cooper, La fracture des nations. Cette « fracture » est le passage d’un monde où a prévalu l’équilibre de forces entre puissances à un nouveau système, issu de 1989, basé sur la civilisation honnête et démocratique, mais qui doit faire face à des zones de chaos et donc à des périls, vu l’interconnexion des différentes parties de la planète.

Robert Cooper interprète à sa manière le fameux texte sur la stratégie de sécurité nationale, pondue par l’administration Bush, et l’adapte à la situation européenne. Quand le premier fonctionnaire de l’Europe chargé de l’armée, celui qui élabore les politiques fondamentales de l’Union en la matière, se met à revendiquer le droit d’intervention dans le monde au nom de l’ordre, de la paix, de la stabilité et de la démocratie (mais tout cela, au profit de qui, sinon des élites occidentales ?), il y a de quoi avoir des frissons dans le dos.




La guerre préventive en Europe

La fracture des nations

Le travaillisme britannique n’est plus ce qu’il était. C’est sans doute ce que beaucoup pensent. Tony Blair et son équipe sont passés par-là. Et, quand on sait que c’est lui qui a défendu le retrait du droit de grève dans le projet de Constitution européenne, on peut se dire qu’entre le « nouveau » Labor Party [1] et les conservateurs de Margaret Thatcher il n’y a pas tellement de différences. C’est sans doute à la fois faux et vrai.

Il y a une redéfinition à tous les niveaux de la politique social-démocrate anglaise. En matière sociale, on connaît le rôle joué par le sociologue Anthony Giddens. C’est celui-ci, au nom de la troisième voie, qui a lancé l’idée d’accepter l’économie de marché, tout en aménageant la « société de marché » [2]. Autrement dit, reprendre en gros les concepts de Thatcher, surtout en ce qui concerne les privatisations, la flexibilité et la précarisation de l’emploi, mais en y ajoutant quelques garde-fous pour éviter les aspects les plus criants de paupérisation absolue.

Vis-à-vis de la politique étrangère, il y a également une nouvelle manière de voir. Celle-ci a été élaborée, en partie, au sein de think tanks proches du Labor Party dans les années 90. En la matière, l’un d’entre eux est sans doute prépondérant : le Foreign Policy Centre (le centre de politique étrangère). Créé en 1993, il avait pour président d’honneur Tony Blair en personne et pour membre éminent Robin Cook, l’ancien ministre des Affaires étrangères de l’équipe travailliste. C’est là que s’est progressivement développée la notion d’intervention à l’étranger au nom de raisons éthiques et humanitaires [3].

De conseiller britannique à idéologue de la guerre de l’Union européenne

Robert Cooper a fait ses premières armes, si l’on peut dire, dans ce cercle. Il a été nommé conseiller en politique étrangère au sein du département des Relations internationales. Il a développé une argumentation pouvant justifier cette orientation. Un premier ouvrage a été publié en 2000 par le Foreign Policy Centre et par un autre think tank proche de Blair, Demos [4] : « The Postmodern State and the World Order » (l’Etat postmoderne et l’ordre mondial).

En avril 2002, Robert Cooper publie dans The Observer un article remarqué : « The New Liberal Imperialism » (le nouvel impérialisme libéral) [5]. Il vante, en effet, les mérites de l’impérialisme face aux Etats en déliquescence et face au terrorisme. Il écrit : « Le défi du monde postmoderne est de se faire à l’idée de doubles normes. Entre nous, nous opérons sur la base de lois et de sécurité d’une façon ouverte et coopérative. Mais quand nous traitons avec les types d’Etats plus démodés en dehors du continent européen, nous devons en revenir aux méthodes plus brutales d’une ère antérieure - la force, l’attaque préemptive, la supercherie, tout ce qui est nécessaire pour traiter avec ceux qui vivent encore dans le monde du XIXème siècle. Entre nous, nous conservons la loi, mais quand nous opérons dans la jungle, nous devons aussi utiliser les lois de la jungle. Durant la période prolongé de paix en Europe, nous avons la tentation de négliger notre défense, à la fois physique et psychologique. Ceci représente un des grands dangers de l’Etat postmoderne » .

Il ajoute : « Ce qu’il faut, c’est une nouvelle forme d’impérialisme, une qui soit acceptable pour un monde fondé sur les droits de l’homme et les valeurs cosmopolites. Nous pouvons déjà délimiter ses contours : un impérialisme qui, comme tout impérialisme, vise à apporter l’ordre et l’organisation, mais qui repose aujourd’hui sur un principe volontaire » . Ainsi, la domination et l’hégémonie sont justifiées puisqu’elles reposent sur des valeurs « éthiques » (ce que tout impérialisme a toujours affirmé, d’ailleurs). Les Etats-Unis, l’Europe peuvent donc être brutaux, injustes, rapaces, vis-à-vis de l’Irak, de l’Iran, de la Corée du Nord, de l’Afghanistan, du Soudan, etc., puisque c’est la loi de la jungle qui prévaut.

En 2002, ces propos ne l’empêchent pas d’être en charge des relations internationales et des affaires politiques et militaires auprès du Conseil des ministres de l’Union européenne. Cela signifie qu’il est devenu le numéro deux de la politique européenne de sécurité et de défense commune, derrière Javier Solana. Il en est même l’idéologue. Il est l’inspirateur du document présenté au sommet européen de Thessalonique de juin 2003, « Une Europe sûre dans un monde meilleur »  [6], où les responsables européens justifient les guerres préventives [7].

Son nouveau livre, La fracture des nations, reprend donc l’idéologie qui anime les responsables britanniques de politique étrangère et influence de façon décisive les orientations européennes. Une analyse un peu scrupuleuse de son argumentation mérite donc l’attention.

L’histoire revisitée

Pour Cooper, le tournant récent de l’histoire a eu lieu en 1989. Non seulement parce que cela marque la disparition du camp socialiste (ou communiste) et celle programmée de l’URSS. Mais également parce que c’est aussi la fin des Etats-nations tels qu’on les a connus : « 1989 marque une rupture dans l’histoire européenne. (...) Ce qui s’est passé en 1989 n’a pas seulement marqué la fin de la guerre froide mais aussi la fin du système de l’équilibre des forces en Europe »  [8].

Pour comprendre cette situation et en saisir l’importance, il faut remonter dans l’histoire. Au début était le chaos : pas de civilisation, pas de structure, pas de véritable progrès. Pour y remédier, les hommes ont créé les empires. Un empire est une construction humaine qui, grâce à un pouvoir autoritaire, maintient à l’intérieur d’un territoire plus ou moins défini une cohésion politique et sociale. Au grand bénéfice de ceux qui habitent cette région : « Le choix pour les mondes antiques et médiévaux résidait entre l’empire et le chaos. En ce temps-là, le mot impérialisme n’était pas encore péjoratif. Ceux qui vivaient à l’intérieur de l’empire jouissaient de l’ordre, de la culture et de la civilisation. Au-dehors étaient les barbares, le désordre et l’anarchie »  [9]. C’est déjà une manière de présenter qui justifie tout pouvoir par rapport à son absence, décrite comme l’état le plus désastreux de l’humanité. Il ajoute d’ailleurs : « Depuis, l’image de la paix et de l’ordre sous une domination souveraine n’a rien perdu de sa force »  [10].

De là, Cooper en tire que les hommes cherchent à ériger des empires. Il faudrait d’ailleurs se demander : quels hommes ? les élites ou les esclaves, les paysans, les artisans ?

Continuons. Mais, en Europe, c’est l’échec. L’empire de Charlemagne ne dure pas. A sa place se constituent une multitude de « petits » Etats indépendants, concurrents les uns des autres. Ce qui manifeste une faiblesse va, néanmoins, se transformer en force. Car l’Etat, même limité, combine aussi une structuration politique et, ce qui est différent de l’empire, basée sur ses lois propres et non plus sur un ordre déclaré universel. Mais, comme ces pays sont nombreux, ils sont en compétition. Ce qui va être « source de progrès social, politique et technique »  [11]. Car, d’un côté, la guerre pouvait devenir permanente et plonger le continent dans le chaos. De l’autre côté, il fallait empêcher l’émergence d’une puissance au-dessus du lot, imposant son hégémonie au reste des Etats, donc revenant à la situation antérieure d’empire.

Il fallait « imposer un système d’équilibre des forces »  [12]. C’est ce qui se passe avec le traité de Westphalie en 1648. Celui-ci définit la conception moderne de l’Etat-nation et, avec elle, celle de l’équilibre des forces.

Seulement, avec l’unification allemande en 1871, se crée un Etat trop grand et trop fort pour l’Europe continentale [13]. Il se crée un déséquilibre et donc une instabilité dans la situation européenne. Cela aboutit à différentes guerres, dont les deux conflits mondiaux du XXème siècle. La politique de maintenir les forces en présence devient de plus en plus difficile. Cooper écrit : « Le système de l’équilibre des forces était déjà mort en 1919, même si lors de la Seconde Guerre mondiale il se formerait une dernière coalition destinée à préserver le système d’Etat européen »  [14].

Après 1945, les empires coloniaux tombent. Il ne subsiste plus que deux blocs ou « empires ». C’est « une simplification ultime et culminante de l’équilibre des forces »  [15]. Et qui plus est : par la terreur. Car les deux survivants de cette lutte peuvent chacun anéantir la planète grâce à leurs armes de destruction massive.

Le combat entre ces deux systèmes ne peut tourner qu’à l’avantage des Etats-Unis, selon Robert Cooper. Car le communisme n’a pas de légitimité, affirme-t-il. En particulier pas de base démocratique. Or, en 1989, c’est la démocratie qui triomphe. Mais ceci a une conséquence fondamentale : « La démocratie, idée victorieuse de la guerre froide, est une tueuse d’empires »  [16]. Donc l’équilibre des forces n’est plus possible, mort dans les conflits européens incessants depuis 1871. Et l’empire ne l’est plus non plus, puisque ce sont les valeurs des droits universels qui prédominent et qu’elles sont réfractaires à la notion d’hégémonie impériale. Il faut dès lors autre chose, une nouvelle structuration du monde.

A ce stade, on peut affirmer que l’analyse historique de Robert Cooper est très partiale (pour ne pas dire plus). Elle associe nettement le souci d’ordre, de justice, de civilisation, de progrès, de souveraineté et finalement de liberté et de démocratie. C’est l’Etat, dans sa formulation historique, qui répond le mieux à l’aboutissement de ces valeurs [17]. Hors l’Etat, sous sa forme empire, Etat-nation ou - on va le voir - postmoderne, c’est le chaos, l’anarchie, le « chacun pour soi », la situation de non-droits, la loi de la jungle. Voilà une dichotomie qui ne peut que réjouir tous les dirigeants de la planète. Oubliés ou négligés les violences des pouvoirs impériaux, les décisions fantasques des empereurs romains, la sauvagerie des seigneurs féodaux, la barbarie des croisés, l’absolutisme des rois français, le colonialisme, la naissance et le développement du fascisme... Décidément, avec l’auteur britannique, l’Europe s’en sort bien.

L’impérialisme défensif

En 1989, se substitue à l’équilibre bilatéral de la terreur un monde sans doute plein d’espoirs, mais également plein de risques. Car il n’est pas uni. En fait, coexistent trois systèmes : prémoderne, moderne et postmoderne.

« Il y a d’abord un monde prémoderne, pré-étatique fruit du chaos postimpérial. Nous en avons des exemples avec la Somalie, l’Afghanistan, le Liberia. Dans ces zones, l’Etat ne remplit plus le critère de Max Weber selon lequel il détient légitimement le monopole de la force »  [18]. Il faudrait pouvoir intervenir pour rétablir l’ordre, mais les Etats européens, les Etats-Unis..., ne veulent plus gouverner ses territoires. Dès lors, c’est le chaos. « Le monde prémoderne appartient à une autre époque, à une autre zone temporelle : là, comme dans le monde antique, le choix se situe entre l’empire et le chaos. Et, aujourd’hui, parce qu’aucun d’entre nous ne voit d’utilité dans l’empire, nous avons souvent choisi le chaos »  [19]. Notons de nouveau que ceux qui déterminent l’avenir de ces pays, selon l’auteur, ne sont pas les populations indigènes, mais les dirigeants européens et américains.

Ce qui amène d’ailleurs Robert Cooper à ajouter, si ces pays deviennent trop dangereux, que le chaos menace y compris les pays occidentaux, si des groupes au sein de ces nations acquièrent des armes de destruction massive, il faut intervenir : « S’ils deviennent à leur tour trop dangereux pour être tolérés par les Etats, il est alors possible d’imaginer un impérialisme défensif »  [20]. C’est-à-dire rétablir l’ordre par la force avant que le chaos ne devienne trop inquiétant pour l’Occident.

Le second monde est le moderne, c’est-à-dire celui de l’Etat-nation. Son pouvoir et sa légitimité se fondent sur la nation. Mais, si cet univers est normalement stable, il n’est pas sans danger. Car fondé toujours sur l’équilibre de forces, alors que cet équilibre n’existe pas toujours. Exemple : Saddam Hussein, qui avec l’annexion du Koweit, aurait pu avoir un poids trop important (pour qui ?) au Moyen-Orient. Et que dire de la Chine et de l’Inde qui présentent, selon l’auteur, bien des caractéristiques impériales. D’où le danger : « Avec l’émergence de nouvelles puissances étatiques, il est possible que surgisse un nouvel impérialisme »  [21]. De nouveau, l’Occident doit empêcher cette éventualité, donc agir pour maintenir, là où il est instable, l’équilibre des forces.

Enfin, il y a le monde postmoderne. C’est le dépassement de l’Etat-nation, donc de la souveraineté nationale. Mais il n’y a qu’un seul exemple politique et durable de cette situation : l’Union européenne, pour laquelle les matières ont été progressivement transférées vers un pouvoir supranational, avec l’accord des différents gouvernements membres. De ce fait, les frontières deviennent de moins en moins importantes ; la distinction entre affaires intérieures et extérieures commence à s’estomper. Acquérir des territoires pour exercer sa puissance et assujettir des populations indigènes ne révèle plus aucun intérêt pour la plupart des Etats.

Robert Cooper définit une caractéristique majeure du monde postmoderne : « L’élément de réponse fondamental est que le « monde est devenu honnête ». Les plus puissants des Etats ne veulent plus ni se battre ni conquérir »  [22]. Et, ajoute-t-il, l’impérialisme ancienne manière ne peut revenir, car « l’idéologie occidentale est démocratique et que la démocratie ne peut s’appliquer par la force (bien que les pressions militaires puissent favoriser la chute des dictateurs) »  [23]. C’est le meilleur des mondes occidental. Enfin... selon Robert Cooper.

Si l’Union européenne est le prototype de cette forme, les Etats-Unis, eux, en revanche, font partie de ce monde, tout en y étant étranger. Formellement, l’Amérique est encore un Etat-nation qui définit sa politique elle-même. Mais, en même temps, c’est la force suprême qui garantit la stabilité du monde, donc le maintien du chaos dans des zones limitées et l’équilibre des forces au sein des pays. Robert Cooper explique : « L’Amérique appartient-elle à ce monde postmoderne ? Il ne serait pas excessif de dire que c’est elle qui l’a inventé. Si les Européens ont pu établir de façon transparente une sécurité commune, c’est parce que derrière tout cela se tient l’Amérique - et la sécurité qu’elle peut imposer par la force armée. En un sens, les Etats-Unis sont tenus en dehors et au-dessus du système, tel son gardien » [24].

Ce qui rend la situation difficile, c’est la coexistence de ces trois mondes qui exigent des politiques spécifiques. « Il y a plutôt une zone de sécurité en Europe et, au-delà, une zone de danger et de chaos. Ce qui rend ce monde particulièrement difficile et dangereux, c’est que par le truchement de la mondialisation, les trois zones sont interconnectées. Un monde divisé en trois a besoin d’une triple politique de sécurité et d’une triple idéologie, ce qui représente une triple difficulté »  [25].

On en revient alors aux idées et conceptions que l’auteur britannique a développées dans son article d’avril 2002 : la nécessité d’intervenir dans les deux mondes les moins avancés pour assurer un ordre stable. Sur ce plan, l’Europe doit apprendre à utiliser la force. « Il y a donc là une difficulté pour l’Etat postmoderne. Il lui faut s’habituer à l’idée qu’il y a deux poids deux mesures. Entre eux, les Etats postmodernes fonctionnent grâce à des règles établies et à l’existence d’une sécurité fondée sur la coopération et l’ouverture. Cependant, lorsqu’ils ont affaire à des Etats étrangers à ces conceptions, les Européens doivent recourir à des méthodes d’une époque antérieure - force, attaque préventive, ruse, tous ces artifices qu’il est nécessaire d’utiliser contre ceux qui vivent encore dans un monde où prévalent, comme au XIXème siècle, les règles du chacun pour soi » . Et Cooper termine ce raisonnement par : « Dans la jungle, ils doivent appliquer les lois de la jungle » [26].

Dans ce cadre, la priorité est d’empêcher la prolifération des armes de destruction massive. C’est ce qui justifie la Stratégie de sécurité nationale américaine. En fait, Robert Cooper est en train de fournir une argumentation européenne à cette orientation, qu’on peut certainement qualifier de belliciste.

Armer l’Europe !

Ce qui frappe, poursuit Robert Cooper, c’est la différence entre les capacités militaires des Etats-Unis et celle de l’Union européenne. Or, l’écart grandit même d’année en année, constate-t-il. Dès lors, s’il faut intervenir quelque part, y compris en Europe (comme, par exemple, dans les Balkans), seul Washington peut l’envisager et le réaliser. Il conclut : « sur le plan de la sécurité, le muscle est américain » [27].

Mais ce n’est pas tenable à terme.

D’abord, du côté américain, c’est une mission trop lourde, qu’un pays ne peut tenir à lui seul. C’est trop d’engagements, sur le plan à la fois du personnel et du financement. Ensuite, un ressentiment contre les Etats-Unis commence à naître dans le tiers-monde. Il sera peut-être de ce fait plus difficile à Washington d’intervenir, alors que le besoin s’en fera davantage sentir pour l’Occident. Enfin, si les Etats-Unis prennent les devants, ils imposent également leurs choix. Or, une menace pour l’Amérique ne sera pas vue comme telle par l’Europe et inversement.

Si l’Europe veut que ses intérêts continuent à être défendus, elle ne peut continuer à faire confiance aux Etats-Unis. Elle doit participer aux actions de maintien de l’ordre au niveau mondial. En d’autres termes, il faut éliminer cette réticence pacifique propre au « vieux » continent, augmenter les budgets militaires et intégrer les différentes capacités autour d’une politique commune. Comme le conçoit le Pentagone, il faut intervenir dans des pays lointains : « La défense du pays commence désormais à l’étranger... dans des pays comme l’Afghanistan et l’Irak »  [28].

Robert Cooper présente une nouvelle version du « si vis pacem para bellum » (si tu veux la paix, prépare la guerre), chère aux Romains : « le multilatéralisme, s’il se veut efficace, doit s’adosser à la force, y compris armée. Si l’Union européenne tient à un système multilatéral, elle doit s’engager plus fortement à le soutenir »  [29]. Il ajoute : « la politique étrangère traite de la guerre et de la paix, et les pays qui ne voient que la paix ratent la moitié de l’histoire, peut-être la partie la plus importante »  [30].

Il termine par cette citation de George W Bush, s’adressant à l’American Enterprise Institute en février 2003 : « Nous nous rencontrons ici pendant une période cruciale de l’histoire (...) du monde civilisé. Une partie de cette histoire a été écrite par d’autres. Le reste sera écrit par nous » . Et Robert Cooper de conclure : « Si nous voulons que ce « nous » inclue l’Europe, nous devons exercer une plus grande influence sur les Etats-Unis. Et cela implique que nous prenions du poids : un poids militaire associé à une légitimité multilatérale »  [31].

Un néocolonialisme affiché

Il est difficile de chercher dans ses propos le soupçon d’idées social-démocrates traditionnel, qui montre que l’auteur est un peu de gauche. Ici, il n’y a rien. C’est un plaidoyer sans scrupules et sans détour pour la domination occidentale.

L’insistance sur la démocratie, la liberté, les valeurs « éthiques » ou autres ne doit pas faire illusion. De tout temps, ceux qui ont envahi ont trouvé pareil justificatif pour le faire. Rappelons-nous que la colonisation du Congo s’est déroulée au nom de la lutte contre l’esclavage des Noirs par les arabes, vaste conception civilisatrice défendue par le roi belge Léopold II. Avec pour résultat, une exploitation de la population indigène dans les plantations pire encore que celle qu’elle subissait auparavant. Toute la colonisation européenne a progressé d’ailleurs sur la base de la prédominance de la civilisation et du progrès que pouvait apporter le « vieux » continent.

C’est une conception que l’on retrouve, en fait, dans les arguments avancés par Robert Cooper. Il présente une vision non seulement qui justifie la domination occidentale, mais également qui affirme la supériorité de sa civilisation. Au classement hiérarchique des pays, l’Union européenne et, dans une moindre mesure, les Etats-Unis sont placés en tête. Ce sont eux le monde postmoderne. Ce sont eux qui véhiculent les idées « nobles », démocratiques, les valeurs de l’humanité... Les autres, c’est le chaos, les Barbares, éventuellement les empires poussés par les intérêts nationaux (c’est-à-dire non purs, non débarrassés des préoccupations égoïstes).

Les autres forment une menace potentielle. Mais une menace pour qui ? Pour les millions de gens qui souffrent de la faim ou de la malnutrition, qui n’ont pas d’eau potable, qui ne disposent pas d’électricité, qui ne logent pas sous un toit, qui ne bénéficient pas d’un enseignement élémentaire ? Bien sûr que non ! Ceux qui vivent sous ce danger, ce sont les élites occidentales, celles qui possèdent une fortune, qui se murent derrière des enceintes pour ne plus être touchés par la misère et la maladie de la planète. C’est pour elles que Robert Cooper écrit. Qu’importe si le monde « prémoderne » reste dans le chaos, l’anarchie, la famine, l’épidémie... Cela n’intéresse l’Occident que si cela constitue ou si cela transforme en une menace pour lui.

Or, dans une situation de misère telle, que peuvent espérer ces populations sinon la révolte ? Une colère pour reprendre en mains leur sort, pour se réapproprier les ressources naturelles, les premières richesses de leurs contrées, pour faire profiter plus équitablement la masse des gens des différentes productions qu’elle réalise. Une colère parfaitement justifiée, mais qui va entrer en conflit avec les besoins de ce fameux monde postmoderne. En effet, que se passera-t-il si les pays du tiers-monde, qui composent les systèmes prémodernes et modernes, contrôlent à nouveau le pétrole, les autres matières premières et exigent des prix plus élevés ? Que se passera-t-il s’ils exercent une surveillance plus stricte sur les monnaies et les capitaux qui entrent et sortent de leurs territoires ? Que se passera-t-il s’ils demandent une répartition plus juste de la valeur créée chez eux ?

Quoi, s’écriera notre ami Cooper ? Quelle honte ! Osez revendiquer un nouveau partage au détriment du monde postmoderne, quelle atteinte aux valeurs universelles ! Quel danger pour la démocratie ! C’est le moment d’aller punir ces Barbares du chaos ou ces empires en formation . N’écrit-il pas en effet le plus clairement : il est « indispensable pour les pays occidentaux qu’aucun pays ne soit en position de dominer les réserves pétrolières mondiales, que les armes nucléaires ne puissent pas tomber dans les mains de petits Etats instables, agressifs ou gouvernés par des irresponsables, que les réseaux terroristes n’aient jamais une nouvelle occasion de croître aux dimensions d’une organisation comme Al-Qaida »  [32] ? « Cela signifierait qu’une partie du monde - une partie potentiellement hostile - échapperait au contrôle américain, et c’est là que se situent de nombreux dangers en puissance »  [33].

Qu’est-ce ceci, sinon du néocolonialisme ? Les pays du tiers-monde ne peuvent contrôler le pétrole. C’est l’Occident qui doit le faire. Ils ne peuvent être hostiles aux Américains et échapper à leur hégémonie. C’est effectivement de l’impérialisme, nullement défensif, mais le plus brutal et le plus sauvage qui soit. Un projet de domination qui ne laisse aux peuples de la terre que misère, désertification et épidémies. Et cela de la part d’un ancien conseiller du Labor Party et actuellement idéologue de la politique de sécurité et de défense européenne, également sous l’égide d’un social-démocrate, Javier Solana ! ! !

Le projet guerrier de l’Union européenne

Nombreux sont ceux qui soulignent l’ambition de paix de l’Europe. Celle-ci est même inscrite dans les valeurs de l’Union, dans le nouveau projet de Constitution européenne : « L’Union a pour but de promouvoir la paix, ses valeurs et le bien-être de ses peuples »  [34].

Mais comment croire cela, si ce n’est que comme une bonne intention, lorsqu’on lit les arguments du numéro deux de la politique étrangère européenne ? Il démontre des préoccupations opposées.

D’abord, il assigne à l’Europe la capacité de décréter ce qui est bon pour la planète, comme forme supérieure d’organisation (la forme postmoderne). C’est elle (avec les Etats-Unis, et sans doute le Japon, voire quelques autres) qui peut décider si la paix est menacée, sélectionner ceux qui peuvent avoir des armes de destruction massive, posséder les matières premières stratégiques comme le pétrole, etc. Et c’est pour faire respecter cet ordre international que les forces armées sont nécessaires. On a vu que cela s’apparentait à une version de néocolonialisme et d’impérialisme le plus abject.

Ensuite, Robert Cooper prône ouvertement une hausse non négligeable des budgets militaires, une augmentation des capacités militaires et une intégration de celles-ci, de sorte qu’un chasseur anglais puisse enfin atterrir sur un porte-avions français. Ceci n’est pas seulement qu’un voeu d’un idéologue, certes placé à une position de choix dans la construction militaire européenne. C’est également l’orientation des développementsrécentsde la défense de l’Union.

Enfin, l’auteur britannique a une conception de la défense très offensive. Protéger le territoire européen ne consiste pas en la constitution de milices populaires armées positionnées partout en Europe. Au contraire. Ceci serait sans doute trop dangereux pour les élites européennes. On ne sait pas très bien si les gens ne retourneraient pas à un moment ou un autre les armes contre celles-ci. En revanche, avoir une armée de professionnels spécialisés dans la technologie et capables d’intervenir en très peu de temps à n’importe quel point du globe, voilà ce que Robert Cooper propose. Car, explique-t-il, « la défense de l’Europe commence en Afghanistan et en Irak » et n’importe où le chaos menace le « vieux » continent. Une idée extrêmement contestable, compréhensible si on a des vues de domination sur les pays du tiers-monde, mais inacceptable pour la souveraineté et donc la démocratie de ces nations. Cela justifie, en tous les cas, l’interventionnisme à l’étranger, base de tout impérialisme et de tout projet hégémonique.

Sans doute Cooper précise-t-il que celui-ci doit trouver des motifs valables, issus des valeurs « morales » de l’Union. Mais n’est-il pas facile de présenter tel ou tel pays ou gouvernement d’une façon diabolique pour justifier une intervention ? Sans vouloir dépeindre Saddam Hussein comme un petit saint, n’a-t-on pas parlé de lui comme le nouvel Hitler ? Alors que ce dernier était à la tête d’une nation surarmée et surexcitée et que, d’autre part, les inspecteurs cherchent encore la moindre arme de destruction massive entre le Tigre et l’Euphrate ? D’ailleurs, cette agression oppose Tony Blair et Robin Cook, son ancien ministre britannique des Affaires étrangères, animé de conceptions similaires, mais qui estime que la guerre contre l’Irak n’avait pas de caractère éthique et qui a démissionné.

En bon Britannique, Robert Cooper ne défend pas un projet hégémonique pour l’Union européenne. Il pense que ceci est impossible, tant l’avance des Etats-Unis en cette matière est importante. Il propose donc à l’Europe de s’intégrer dans la manière américaine de gérer le monde. De toute façon, il y a une similitude de vue entre le travailliste Cooper et l’administration de la Maison Blanche [35]. D’une certaine manière, le livre de Robert Cooper est une version européenne des thèses des faucons américains (Robert Kagan, William Kristol, ...), qui justifie l’hégémonie américaine à partir des valeurs de démocratie libérale prônées de tout temps par Washington. Tout comme « Une Europe sûre dans un monde meilleur » est le pendant européen de la Stratégie de sécurité nationale, définie en septembre 2001, par l’administration Bush. Il y a concordance des objectifs et de l’argumentation.

Ce que le numéro deux de la politique étrangère de l’Union veut, c’est une coopération entre les deux entités pour gérer ensemble le monde. Mais qui dit « gérer » dans le contexte actuel signifie, dans les faits, dominer. Robert Cooper propose donc que l’Union européenne s’associe au projet hégémonique américain. C’est-à-dire un plan pour faire de l’Europe une puissance militaire, impérialiste. C’est l’objectif fondamental de son livre. Un but à rejeter à tout prix.

Une autre conception de la défense

L’ancien conseiller de Blair utilise une astuce pour gagner une partie de la population à son projet guerrier : il le justifie au nom des valeurs démocratiques, qui seraient l’apanage de l’Europe ; donc une intervention à l’étranger de la part de l’Union serait parée de toutes les vertus. Au nom de la démocratie, on peut tout faire (ou presque) [36].

Ceci mérite une réflexion. Même si les arguments étaient valables, il n’est pas sûr que des choix démocratiques, parce qu’ils sont obtenus par un vote de tous les citoyens, après un débat bien informé, etc., doivent permettre n’importe quoi. Après tout, Athènes, qui est considérée comme le berceau de la démocratie (néanmoins, construite sur le travail de dizaines de milliers d’esclaves), pouvait décider, après discussion sur l’agora, d’aller faire la guerre à telle ou telle contrée et de la piller. Et, dans certaines circonstances, cette action de rapine peut améliorer le sort des plus pauvres de la cité. Une petite part du butin peut leur être destinée. C’est néanmoins inacceptable.

Le principe qui ne peut être franchi dans le monde actuel est justement celui qui est qualifié de dépassé par Robert Cooper, celui de souveraineté nationale. Chaque pays doit décider, selon ses règles et ses principes, ce qui lui convient. Si ce processus ne se déroule pas de façon démocratique, ce n’est pas aux gouvernements voisins de l’affirmer, mais aux gens du pays même. C’est à eux que revient la responsabilité de la lutte, de l’opposition, voire de la révolte. On peut les soutenir, les aider, mais pas accomplir leurs devoirs et leurs combats à leur place.

Sur cette base, on peut alors définir ce que devrait être une Europe de la défense. Certains peuvent penser, à juste titre, que, normalement, il n’en faudrait pas. C’est exact. Mais, la situation mondiale étant ce qu’elle est, la rapacité des détenteurs de capitaux de s’approprier ce qui peut fructifier leurs avoirs étant telle, il est peu probable qu’à court terme, on puisse s’en passer, même si l’objectif est bel et bien d’éliminer une fois pour toutes la guerre.

Il nous semble, dès lors, qu’une véritable politique militaire européenne axée sur la paix devrait contenir au moins ces cinq points :

1. Refus de suivre les Etats-Unis dans leurs projets guerriers et dans leurs plans d’hégémonie mondiale. Condamnation de toute stratégie américaine allant dans ce sens. Ce qui implique de revoir les mesures prises dans le cadre des institutions internationales comme la Banque mondiale, le FMI [37] et l’OMC [38] qui favorisent l’appauvrissement du tiers-monde en faveur des multinationales américaines (européennes et japonaises aussi, bien sûr). Réforme de l’ONU [39] pour donner plus de poids à l’Assemblée générale (au détriment du Conseil de sécurité où Washington peut bloquer toute décision grâce à son droit de veto, ce qui lui permet de soutenir toutes les infractions d’Israël).

2. Suppression de l’OTAN, comme bras armé de la mondialisation néolibérale, agissant en premier lieu au service des intérêts américains. Encouragement des pays européens à sortir de cet organe.

3. Constitution d’une armée populaire de citoyens. L’alternative est la création de forces armées spécialisées, comme c’est le cas dans la plupart des pays. Cela a l’avantage de supprimer le service militaire obligatoire. Mais ces soldats obtiennent un monopole sur l’utilisation des armes. L’armée peut alors servir d’instrument dans les mains d’un pouvoir quelconque, y compris d’une dictature. Elle risque d’être coupée de la population. A terme, il se peut qu’elle ne soit plus composée que de mercenaires se vendant aux plus offrants. Pour éviter un tel développement, il vaut mieux en revenir à une armée de citoyens. Le risque de manipulation existe toujours, mais il sera moins grand.

4. Organisation de l’armée sur base d’une conception de défense du territoire. Avec des armes de défense. Cela signifie une occupation du territoire et des frontières pour empêcher, avant tout, d’éventuelles invasions.

5. Pas d’ingérence à l’étranger. Ce qui est un corollaire du point précédent. Le but est de protéger le territoire, non d’aller défendre les puits de pétrole des multinationales européennes au Moyen-Orient.

Evidemment, ceci mérite discussion. C’est pourquoi ces revendications sont présentées d’ailleurs. Au moins que le livre de Cooper serve à quelque chose de positif.

Henri Houben

Cooper Robert , La fracture des nations. Ordre et chaos au XXIème siècle, éditions Denoël, Paris, 2004, 211 p.
En anglais : The Breaking of Nations, New York, 2003.

Notes

[1Parti travailliste, membre de l’Internationale socialiste et du parti des socialistes européens. C’est-à-dire l’équivalent des partis sociaux-démocrates sur le continent.

[2Anthony Giddens et Tony Blair, La troisième voie. Le renouveau de la social-démocratie, éditions Le Seuil, Paris, 2002.

[3Voir à ce sujet : Keith Dixon, La mule de Troie. Blair, l’Europe et le nouvel ordre américain, éditions du Croquant, Broissieux, novembre 2003. La contradiction entre cette conception « morale » et le choix de participer à la guerre de Bush en Irak a eu pour conséquence la démission de Robin Cook comme ministre de Blair.

[4Créé en 1988 par Geoff Mulgan, conseiller de Blair, et par Martin Jacques, ancien rédacteur en chef de la revue théorique du parti communiste britannique, Marxism Today. Voir Keith Dixon, op. cit., p.120.

[5The Observer, 7 avril 2002

[6Pour une analyse de ce document, voir Colonialisme préventif ?.

[7Ce qui a été changé diplomatiquement en engagement « préemptif » au sommet européen de décembre 2003 à Bruxelles. Il y a une différence entre « préventif » et « préemptif » : préventif permet une intervention, même si la menace extérieure n’est pas imminente ; préemptif impose théoriquement un danger réel d’agression étrangère auquel on répond par une attaque avant que l’adversaire ne le fasse. En général, une action préemptive est considérée comme acceptable : on précède l’attaque qui, de toute façon, va avoir lieu ; une intervention préventive, non. Mais, dans les faits, cela ne change pas tellement.

[8Robert Cooper, La fracture des nations, éditions Denoël, Paris, 2004, p. 17.

[9Robert Cooper, op. cit., p.23.

[10Robert Cooper, op. cit., p.23.

[11Robert Cooper, op. cit., p.25.

[12Robert Cooper, op. cit., p.25.

[13Robert Cooper, op. cit., p.26. Cette interprétation de l’histoire européenne comme un équilibre des forces à conserver à tout prix, pour empêcher l’arrivée d’une puissance continentale, correspond à la stratégie suivie par Londres depuis le XVIIème siècle jusqu’à maintenant. C’est donc une présentation très britannique.

[14Robert Cooper, op. cit., p.27.

[15Robert Cooper, op. cit., p.29.

[16Robert Cooper, op. cit., p.31.

[17Une vision assez hégélienne.

[18Robert Cooper, op. cit., p.33-34.

[19Robert Cooper, op. cit., p.35.

[20Robert Cooper, op. cit., p.35.

[21Robert Cooper, op. cit., p.43.

[22Robert Cooper, op. cit., p.51.

[23Robert Cooper, op. cit., p.51. Notons au passage que Saddam Hussein n’a pas subi une agression, mais une pression militaire. Tout est dans la formule.

[24Robert Cooper, op. cit., p.64.

[25Robert Cooper, op. cit., p.77.

[26Robert Cooper, op. cit., p.84.

[27Robert Cooper, op. cit., p.193.

[28Robert Cooper, op. cit., p.197.

[29Robert Cooper, op. cit., p.199.

[30Robert Cooper, op. cit., p.192.

[31Robert Cooper, op. cit., p.203.

[32Robert Cooper, op. cit., p.57.

[33Robert Cooper, op. cit., p.65.

[34Projet de Traité établissant une Constitution européenne, article 3, paragraphe 1.

[35Voire les faucons du Pentagone ou proches des milieux militaristes. Ainsi Robert Kagan, promoteur du Project for the New American Century (PNAC) qui a pour objectif la perpétuation de l’hégémonie américaine, cite abondamment Robert Cooper dans son livre « Le revers de la puissance » (éditions Plon, Paris, 2004). Il explique, dans des termes qui ne sont pas sans rappeler ceux du conseiller européen à la défense, que les Etats-Unis sont en quête de légitimité dans leurs actions internationales et que celle-ci pourrait être fournie par l’Europe, si celle-ci accepte de cautionner et de participer aux actions américaines. De même, Robert Cooper fait référence à Robert Kagan dans son livre et accepte que le problème de l’Europe est son manque d’ambition et de participation militaire.

[36Et, dans les faits, le gouvernement Blair ne s’est pas gêné pour utiliser tous les moyens pour justifier sa participation à l’agression contre l’Irak : mentir, préparer de fausses preuves, diaboliser, annoncer de fausses menaces, grossir de façon démesurée les dangers réels...

[37Fonds monétaire international.

[38Organisation mondiale du commerce.

[39Organisation des Nations unies.


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