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Ratification de la « Constitution européenne »

Nouvelle situation par pays (7 décembre 2004)

par Henri

La « Constitution européenne » a été adoptée au sommet de Bruxelles des 17-18 juin 2004. Ensuite, elle a été signée officiellement le 29 octobre à Rome par les différents chefs d’Etat et de gouvernement.

Maintenant la parole est aux pays et... aux peuples. Il faut que le nouveau traité soit ratifié par les 25 Etats membres. Ceux-ci ont deux ans pour le faire. Ils ont, pour cela, deux options : débat parlementaire ou consultation populaire. Certains gouvernements se sont déjà prononcés sur ce choix, d’autres comme la Belgique non. Un petit point de la situation.

Une actualisation de l’article paru dans Angles d’Attac n°57 de juillet-août 2004.


Ratification de la « Constitution européenne »

Nouvelle situation par pays (7 décembre 2004)

La « Constitution européenne » a été adoptée au sommet de Bruxelles des 17-18 juin 2004 et signée officiellement le 29 octobre à Rome. Elle doit être maintenant ratifiée par les 25 Etats membres.

Chaque pays a le choix de la manière dont cela peut se passer : débat parlementaire ou consultation populaire.

Certains gouvernements ont déjà décidé l’option, d’autres comme la Belgique non. Un petit point de la situation [1].

Autriche : jusqu’à présent, pas de décision prise. Mais le chancelier Wolfgang Schuessel s’est, à plusieurs reprises, exprimé contre un référendum.

République tchèque : la décision n’est pas encore adoptée, mais normalement la voie référendaire devrait l’emporter. Si c’est une consultation populaire, les partisans du « oui » peuvent se contenter d’une majorité simple. En revanche, en cas de débat parlementaire, il faudra une majorité des deux tiers. Le vote pourrait avoir lieu en 2006, en même temps que les élections législatives.

Chypre : pas de décision prise, mais il est peu probable qu’il y aura un référendum.

Danemark : le gouvernement libéral-conservateur a décidé la tenue d’un référendum. On pourrait dire : comme d’habitude pour ce pays. Il devrait être organisé en 2006.

Estonie : pas de décision prise. Mais probablement, on se limitera à un débat parlementaire.

Finlande : ce sera le parlement seul qui décidera.

France : le président Chirac a annoncé le 14 juillet dernier qu’il y aurait un référendum. Il se tiendrait durant le second semestre de 2005, pour permettre un débat approfondi, selon les dires de Chirac. Mais, avec les polémiques sur la possible entrée de la Turquie dans l’Union, le gouvernement voudrait avancer la date au printemps 2005. Les partisans du « oui » craignent qu’au fil du temps (et du débat), le « non » gagne des adeptes. Ce fut le cas lors du vote sur le traité de Maastricht, qui avait été ratifié grâce à une majorité d’à peine 51%. Une autre possibilité est un vote durant l’été 2005.

Allemagne : la loi fondamentale, qui est l’équivalent de la Constitution en Belgique ou en France, ne prévoit pas de processus référendaire. Dès lors, le chancelier Schröder n’en veut pas. Le débat pourrait se circonscrire au parlement, mais il faudra alors une majorité des deux tiers. Seulement 90% des Allemands aimeraient pouvoir se prononcer directement. Le gouvernement pourrait donc réviser sa position et tenir une consultation populaire préalable.

Grèce : cela devrait être le parlement qui aura le dernier mot.

Hongrie : normalement, la voie législative sera privilégiée.

Irlande : la ratification passera par une consultation populaire. Cela s’impose pour tout changement constitutionnel. Le vote pourrait être organisé fin 2005.

Italie : pas de décision prise. La Constitution italienne ne prévoit pas de décision par voie référendaire. En revanche, le ministre des Affaires étrangères, Franco Frattini (maintenant devenu commissaire européen), serait partisan d’une consultation populaire. Il aimerait un changement de la législation italienne pour ce faire. Le vice-Premier ministre, Gianfranco Fini, est plus réservé sur ce point.

Lettonie : pas de décision prise. Mais le référendum est l’option souhaitée par une majorité de parlementaires. La Constitution lettonne le permet également.

Lituanie : le Parlement national s’est déjà prononcé et a décidé de ratifier le traité constitutionnel, sans consultation populaire. Il est le premier à le faire.

Luxembourg : le gouvernement a décidé d’utiliser le processus référendaire pour la quatrième fois de son histoire. Celui-ci a été inclus dans la Constitution en 1919. La précédente consultation datait de 1937 et portait sur la possible dissolution du parti communiste luxembourgeois. Ce que désirait le gouvernement de l’époque, mais qu’ont refusé les électeurs. Le référendum pourrait être organisé au printemps 2005.

Malte : pas de consultation.

Pays-Bas : la ratification devrait passer par référendum. C’est le souhait d’une majorité de parlementaires. Mais, comme en Belgique, une telle option n’aura qu’une valeur consultative. Si elle a lieu, elle pourrait se tenir au printemps 2005.

Pologne : pas de décision prise. Mais l’aspiration du président polonais et du Premier ministre est de tenir un référendum. Il se pourrait que celui-ci se déroule en même temps que les élections présidentielles qui auraient lieu en automne 2005. Pour sa validité, il faudrait une participation populaire de plus de 50%.

Portugal : le débat devrait être ponctué par un vote populaire. Le Premier ministre a engagé la procédure pour ce faire et cela pourrait avoir lieu en janvier 2005. D’autres le projettent pour le printemps 2005.

Slovaquie : pas de décision prise. La question est ouverte. Une décision parlementaire nécessiterait une majorité des trois cinquièmes (60%).

Slovénie : pas de décision prise.

Espagne : la décision de passer par un référendum pour la ratification a été adoptée par le nouveau gouvernement social-démocrate. Contrairement à la France et à la Grande-Bretagne, les dirigeants espagnols veulent aller vite. Ils ont le soutien du parti populaire (parti de droite de l’ancien Premier ministre José Aznar) pour voter favorablement au projet constitutionnel. La date a déjà été retenue : ce sera le dimanche 27 février 2005. Mais cela peut être retardé. La question posée à la population sera : « approuvez-vous le traité par lequel s’institue une Constitution pour l’Union européenne ? » Par une adoption rapide, le gouvernement espagnol veut devenir un modèle pour les autres pays.

Suède : pas de consultation, uniquement un débat au parlement.

Grande-Bretagne : Tony Blair a été un des premiers chefs de gouvernement à déclarer passer par un référendum. Il est certain que l’opposition au traité constitutionnel est forte dans les îles britanniques. Il n’est pas certain qu’un vote sera favorable au projet. Le vote se déroulerait sans doute après les élections législatives prévues au printemps 2005 et après la présidence britannique de l’Union qui se déroulera durant le second semestre 2005. On parle donc de l’année suivante, en 2006.

La Belgique ne s’est pas encore prononcée officiellement. Mais il y a des chances qu’il y ait un référendum préalable. Il pourrait se tenir au printemps 2005.

Daniel Keohane, dans son article, souligne l’importance de la tenue d’une consultation populaire. Il relève que neuf gouvernements optent pour le référendum et que six autres n’ont pas encore fait connaître leur position définitive. Dès lors, il est possible, poursuit-il, que la moitié de la population européenne puisse donner son avis sur le traité constitutionnel. A juste titre, il appelle cela un « changement sismique dans la politique de l’Union européenne »  [2].

Mais ce qui inquiète l’auteur, c’est qu’avec une consultation populaire les partisans en faveur du traité peuvent perdre. Des craintes sérieuse à ce sujet apparaissent pour la Grande-Bretagne, la Tchéquie, la Pologne, le Danemark, la France et l’Irlande, pays pour lesquels les votes en faveur du « oui » risquent de ne pas dépasser les 50% nécessaires. Et que se passerait-il dans ce cas ?

Il y a trois possibilités, prétend Keohane (ce qui doit refléter effectivement les solutions envisagées par les responsables européens).

Primo, le pays qui a dit « non » revote. C’est une option qui peut être retenue pour les nations qui auront choisi suffisamment tôt dans les deux ans impartis pour la ratification. Des citoyens qui auront pris position par exemple en 2005 et, qui plus est au printemps, pourraient être envoyés une seconde fois aux urnes un an plus tard, avec de nouveaux arguments lancés par leur gouvernement et les associations qui prônent le « oui ». C’est une forme de la « démocratie » européenne : si vous n’êtes pas d’accord avec ce qu’on décide à votre place, nous organisons des élections jusqu’à ce que vous marquiez votre adhésion. Autrement dit, si vous dites « oui », cela compte ; si vous votez « non », cela ne compte pas et on recommence le processus.

Second cas : le pays qui a refusé la ratification est plutôt en marge de la construction européenne. Par exemple, un pays de l’Est, nouvel adhérent, mais également selon Keohane un pays comme la Grande-Bretagne ou une nation scandinave. Dans ce cas, si le premier procédé est impossible, l’Union européenne devra renégocier les termes de l’engagement avec cet Etat récalcitrant. Déjà, la Grande-Bretagne et le Danemark ont des clauses qui les excluent de certains accords. Mais les 24 pays signataires poursuivent le parcours avec le traité constitutionnel comme tel.

Tertio, le pays qui rejette cette « Constitution » fait partie du coeur de la construction européenne comme la France. Dans ce cas, il n’est pas impossible qu’il faille renégocier le traité en tant que tel.

Pour Attac, c’est cette dernière voie qui serait la préférable.

Henri Houben

Notes

[1Informations tirées du think tank de Valéry Giscard d’Estaing, l’Institut pour la Démocratie en Europe et Daniel Keohane, « A Guide to the Referenda on the EU Constitutional Treaty », Centre for European Reform, Briefing Note, 27 octobre 2004.

[2Daniel Keohane, « A Guide to the Referenda on the EU Constitutional Treaty », Centre for European Reform, Briefing Note, 27 octobre 2004.


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